DIALOGUE AVEC L'ANGE
par Chantal Piganeau
Dialogue avec l'Ange est le témoignage d'une rencontre extraordinaire vécue par quatre amis Hongrois, pendant la Seconde Guerre mondiale, avec des êtres de lumière qu'ils ont appelés « Anges ». C'est aussi l'histoire d'Hanna Dabs, qui a transmis à ses amis les pensées, l'inspiration et les enseignements que les « Anges » lui ont donnés, à l'époque dangereuse et terrible des années 1940, en Europe.
Chaque semaine, pendant dix-huit mois, ces « Anges » se sont exprimés à travers Hanna. Ils ont répondu aux questions et délivré un enseignement, initiant chez ceux qui l'ont reçu et mis en pratique, un processus intense de transformation. Benjamin Creme a indiqué que les «Anges » sont en fait les Maîtres Jésus, Morya et Koot Hoomi, «déguisés » en anges.
Hanna Dabs et Joseph Kreutzer forment un couple uni, ils exercent ensemble le métier de décorateurs, graphistes et concepteurs de meubles au sein d'un atelier indépendant à Budapest. Juifs non pratiquants, ils s'intéressent à la philosophie et à la spiritualité.
Gitta Mallasz, une amie de jeunesse d'Hanna, travaille avec eux depuis plusieurs années. Hanna est le coeur et l'âme de cet atelier. C'est une femme chaleureuse, facétieuse, à l'intelligence vive, à la fois intuitive et douée d'un grand sens pratique. Elle est aussi la plus consciente d'elle-même. Depuis longtemps, elle est animée par une grande exigence intérieure. Quand elle enseigne le dessin, ses élèves se sentent touchés au plus profond par ses observations. Hanna cherche à éveiller en eux, l'individu créateur, libéré de la peur.
Les trois amis sont perturbés par la marée du mensonge menant à la guerre, ils décident donc de s'installer à l'écart dans un petit village, pour se tourner vers l'essentiel. Animés par une quête de sens, en dehors de toute pratique religieuse, ils s'efforcent d'approcher la vérité. Lili Strausz est enseignante sportive, juive elle aussi. Amie de Gitta, elle rejoint chaque week-end le petit groupe dont elle partage la quête. Chacun tente de trouver une réponse profonde aux problèmes qui les préoccupent.
Des mots de feu
Un jour, Gitta montre à Hanna ce qu'elle a écrit. De toute évidence, le texte produit par Gitta est un condensé de platitudes, très en dessous de ses capacités réelles.
Hanna se sent soudain animée par une divine colère, elle a juste le temps de dire à son amie : « Attention, ce n'est plus moi qui parle. ». Elle transmet alors des paroles de feu. Ainsi débutent les dialogues.
Chaque semaine, le vendredi à 15 h, de juin 1943 à novembre 1944, ceux qu'elles appellent les « Anges » s'expriment à travers Hanna. Lili se joint à ses amies. Gitta et Lili notent scrupuleusement par écrit les échanges. Joseph, qui au départ, préférait se tenir à distance de l'expérience, décide de s'y intégrer par la suite.
Une conscience élevée
Pendant les entretiens, la conscience d'Hanna est très élevée et élargie. Elle voit ce qui se passe dans la pièce avec une précision et une intensité nouvelle, elle est parfaitement consciente de la présence de son « visiteur », dont elle capte la pensée et dont elle éprouve les perceptions.
Ces dialogues nécessitent la pleine participation d'Hanna, sollicitant une concentration intense, pour recevoir le message et trouver les mots les mieux à même de le traduire. Au début, il arrive qu'elle soit épuisée à la fin d'un entretien ou qu'elle ne trouve pas les mots justes. Elle explique alors après à ses amies ce qu'elle a éprouvé et compris.
Elle sent aussi à quel point l'Ange « s'alourdit » pour descendre au niveau où la rencontre est rendue possible. « Pour toi, il est difficile de t'élever, pour moi, il est difficile de descendre. »
Au fil des entretiens, la sensibilité d'Hanna s'affine et s'intensifie. Réceptive à la vibration élevée des Anges, elle éprouve aussi avec acuité la souffrance de l'humanité prise dans la tourmente.
Progressivement, l'enseignement gagne en intensité, le langage devient de plus en plus rythmé. Hanna transmet alors directement les mots qu'elle entend distinctement intérieurement. Le langage utilisé est un hongrois très pur, avec des mots simples. Les phrases sont concises et les vers ont une musicalité exceptionnelle. Gitta affirme que la lecture à voix haute de ces textes touche les cellules, éveillant l'âme. Elle veillera par la suite, à ce que les différentes traductions puissent servir au mieux la force rythmique de la version hongroise.
Pour faire comprendre des notions subtiles, les Anges utilisent des images symboliques simples, en lien avec la nature le vin et l'ivresse, le pain et le don de soi, l'enfant et le jeu...
Hanna Dallos, Joseph Kreutzer, Liii Strausz et Gitta Mallasz
Invitation à une attention soutenue
Il ne s'agit pas d'un corpus théorique d'enseignement, car les messages viennent en réponses aux questions posées par Gitta et Lili. Chacun des compagnons reçoit une réponse à ses questions. Leur contenu est en relation directe avec la façon dont les quatre amis intègrent et mettent en pratique au quotidien l'impulsion qu'ils reçoivent.
Cet enseignement est universel, il s'adresse à l'être humain, qui aspire à devenir l'acteur inspiré de sa vie. Pas de dogmes, de croyance, ni de rites, mais une invitation à vivre l'expérience du quotidien avec l'intensité permise par une attention soutenue. S'intéresser de près à tous les aspects de sa vie et les placer sous la lampe de la conscience.
« Chacune de tes cellules doit s'éveiller. Chaque pas vers LUI est un éveil. Chaque existence, pas seulement la vôtre, n'est que rêve. Un rêve subtil.., de plus en plus subtil... mais un rêve.
Un seul éveil: LUI ». Et le Maître continue : « Je vous annonce qu'il y aura Délivrance, lorsque l'Unique Lumière aura percé les ténèbres les plus profondes. Nous tous y travaillons. Avec joie et gratitude. Gratitude ! De rêveurs, vous deviendrez éveilleurs. Vous devez arriver à ce point que quiconque vous regarde s'éveille. »
Un peu plus tard, après que Gitta ait posé une question à l'Ange/Maître, la réponse est sévère : « Raye ce mot « Pourquoi » et accomplis ta tâche. Toujours sans « Pourquoi » ! »
L'homme est le grand transformateur
L'homme occupe une place unique dans la création, car il a pour vocation d'être le pont entre les mondes spirituels créateurs, et les mondes créés, que sont les différents règnes de la nature.
Tout est sacré. Tout est tissé de matière et de lumière. Les deux sont à unir. « Si vous pouviez saisir l'attirance d'amour du poids [votre propre matière] vers la lumière, si vous pouviez pressentir l'attirance d'amour de la lumière vers le poids, alors vous goûteriez l'ivresse. »
Spiritualiser la matière constitue le but de la vie en incarnation. Dans le développement spirituel, le petit moi enseigne autant que le SOI. Ils sont partenaires à parts égales. Densité de matière et lumière participent à la transformation. « Celui qui sur la terre est sans poids, est sans voie. »
Poser les actes concrets qui incarnent l'aspiration à s'élever, fait grandir spirituellement.
« Si vous agissez sans LUI, votre main ne fait que brouiller la matière. » « II n'y a pas de foi sans acte. Il n'y a pas d'acte sans foi. Où sont donc vos actes ? », demande l'Ange.
Il ne s'agit pas de devoir, ni de vouloir forcer. « Le vouloir est un mur et non une marche. » C'est au contraire un choix libre, créateur, orienté vers « Le Nouveau ».
Par ses actes conscients, l'homme accueille les forces qui le traversent et les élève, les orientant vers leur juste place, là où elles se transforment et servent la Vie. La force devient destructrice quand elle n'est pas utilisée pour servir. « Car il n’y a pas de mal, il n'y a que la tâche qui n'est pas reconnue. »
Tout acte de foi est avant tout un don, offrande du meilleur de soi-même. Le don est la condition nécessaire de la progression spirituelle : « Donner n'est pas fruit mais croissance. »
Lorsque les Anges nomment un des élèves, ils le désignent, non par son prénom usuel mais par la caractéristique de sa tâche spécifique, soulignant ainsi le caractère sacré du don de soi : Hanna est « celle qui parle », Lili est « celle qui aide », Gitta est « celle qui rayonne » et Joseph « celui qui bâtit.»
Chaque être humain a une tâche créative unique à accomplir, qui donne sens à son existence en incarnation. « Ce n'est pas la mort qui est mauvaise, mais la tâche non accomplie. » Pour cela, il est important de marcher sur son propre chemin, ne pas s'égarer dans l'imitation des autres. Et solliciter l'aide spirituelle, avec sincérité et engagement.
« C'est au sommet de tes questions que tu trouveras la réponse. Je suis là. Je ne peux te parler que de là. »
C'est en accomplissant pleinement sa tâche individuelle que l'on s'inscrit dans l'universel, devenant une source d'inspiration. « Chacun de vos pas à travers le vide devient une île fleurie où les autres peuvent poser le pied. »
La pédagogie de l'Ange invite l'homme à se tenir debout, sans dépendance. Lorsque Gitta exprime le regret de ne pas être toujours en contact avec son Maître, il lui est répondu
« Alors tu ne serais qu'une marionnette ! »
L'Ange veille à ne pas fournir de réponse exhaustive pour laisser place à l'initiative individuelle : « Je te réponds toujours à moitié. J'omets l'autre moitié. Le sens-tu ? »
Chacun des amis évolue sur un des 7 rayons d'énergie qui lui confire des qualités spécifiques. Lili incarne l'amour, sur le rayon 2, elle est guidée par « Celui qui aide ». Gitta, qui incarne la félicité, sur le rayon 6, est guidée par un Maître décrit comme « Celui qui rayonne ». Joseph, qui incarne la paix et le silence pouvant être l'expression du rayon 5, est guidé par « Celui qui bâtit ». Hanna « qui parle » exprime les qualités du 4e rayon, elle est guidée par « Celui qui mesure 2 ».
Gitta décrit le Maître d'Hanna comme une présence à la puissance contenue, à la sévérité mesurée, presque effrayante. Elle le nomme « l'Ange de la divine Justice ». Il exhorte les élèves à se donner complètement, à la mesure exacte de leur possibilité.
Non seulement les quatre se soutiennent et se complètent dans leur mission commune, mais ils accèdent par leur unité, aux sept forces spirituelles qui animent toute la création. « Les sept forces sont à vous. Prenez-les. Mangez-les, mais agissez ! »
Les quatre amis potentialisent leur tâche, non parce qu'ils sont ensemble, mais parce qu'ils sont unis. Lorsque le Maître de Gitta hésite à lui donner une réponse importante, ne sachant si elle serait prête à l'assumer, Hanna s'engage pour son amie, se portant garante pour elle. Gitta reçoit alors sa réponse.
Refuge à Budapest et plan de sauvetage
Après l'invasion nazie, le petit groupe trouve refuge dans la maison des parents d'Hanna, à Budapest, où les déportations n'ont pas encore commencé. Alors que la plupart des juifs cherchent à se procurer de faux papiers, les Anges exhortent les amis à ne pas fuir.
L'enseignement ne constitue plus un dialogue personnel entre Maître et élève, il transmet un message pressant, à la portée universelle. Le langage devient de plus en plus poétique et rythmé.
Joseph reçoit un ordre officiel de déportation. Après le départ de son mari, Hanna est inconsolable. Gitta, dont la vitalité est débordante, veille étroitement sur elle, lui insufflant l'énergie nécessaire à la traversée de cette épreuve.
Par la suite, les trois femmes participent à un plan de sauvetage qui vise à protéger une centaine de femmes juives : A Buda, un petit couvent désaffecté est transformé en usine de confection militaire dont Gitta (la seule qui n'est pas juive) se voit offrir le commandement. Les ouvrières sont de fait, protégées un temps par le nouveau statut de Gitta, par le ministère de la Guerre et par l'Église. Elles cousent tant bien que mal des uniformes, et Hanna et Lili passent souvent la nuit à réparer les erreurs commises.
Gitta impose la discipline indispensable, Hanna gère l'organisation pratique de l'atelier tout en partageant ouvertement ses convictions spirituelles, et Lili diminue les tensions en enseignant la relaxation. Les entretiens se poursuivent dans ce contexte durant les pauses, et gagnent encore en intensité.
Malgré l'angoisse générée par la situation, l'atmosphère de cette usine est d'une « extraordinaire légèreté ». C'est ce don témoignera par la suite, Agnès Péter, une des ouvrières.
L'aventure dans cette usine de confection dure cinq mois. Le 2 décembre 1944, un groupe de nazis hongrois envahi l'usine, les femmes et les enfants ont juste le temps de s'enfui en direction de la forêt pour y trouver refuge. Tous survivront.
Cependant, un groupe de 13 femmes âgées, malades ou trop apeurées pour se sauver, est arrêté. Hanna et Lili en font partie. Elles ont décidé librement d'accompagner ces femmes vulnérables, pour détourner la colère des nazis qui auraient probablement fusillé Gitta, s'ils n'avaient trouvé personne à déporter.
Malgré les circonstances, les précieux carnets où ont été entièrement consignés les entretiens sont préservés et gardé par Gitta. Hanna avait souvent dit à Gitta qu'elle devrait rester en vie pour transmettre les entretiens.
Les treize femmes arrêtées sont déportées à Ravensbrück, 3 dont Hanna et Lili. Les entretiens avec les anges s'arrêtent car toute l'énergie d'Hanna est mobilisée pour survivre. Le jeunes femmes restent solidaires, partageant tout, veillant préserver le mieux possible leur dignité.
Hanna et Lili trouvent la mort en février 1945. La seul survivante de ce groupe de treize femmes, Eva Dànos, témoignera de leur rayonnement spirituel dans cet enfer. Elle dira qu'Hanna et Lili se sont considérées comme des émetteurs d lumière, et se sont comportées comme tel.
Gitta, la seule survivante du petit groupe des compagnons, assurera des années plus tard la publication des dialogues. Traduit dans 21 langues, ce livre a fait le tour du monde, inspirant des milliers de lecteurs.
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2. Bien que BC ne fasse référence qu'à trois Maîtres qui ont participé à l'enseignement des amis, il est possible qu'ils aient été perçus comme quatre entités distinctes. Jeanne d'Arc, au début, croyait entendre trois voix celles de saint Michel, de sainte Catherine et de sainte Marguerite. Selon BC elle n'a en réalité été contactée que par son propre Maître, le Maître Hilarion.
3. Ravensbrück était un camp de concentration allemand exclusivement réservé aux femmes, de 1939 à 1945, situé au nord de l'Allemagne, à 90 km au nord de Berlin, dans un site proche du village de Ravensbrück. Sur les 130 000 femmes détenues, seules 15 000 ont survécu jusqu'à la libération.